Un bruit de doigts qui tapotaient rapidement sur le clavier, entrecoupé par de petits rires discrets. Song Joo Wan était connecté sur My Seoul's Story, un site de rpg en ligne. Sur ce site, il incarnait un beau jeune homme, ce qui était la vérité. Ce beau jeune homme était une personne dévouée, altruiste, prête à porter son aide à quiconque en aurait besoin, sans jamais rien demander en retour... et là, on s'éloignait déjà un peu plus du vrai bonhomme...
Sur ce site où il jouait un personnage à l'opposé de sa psyché, Joo Wan avait une petite amie. Chose inconcevable dans la vraie vie, non pas qu'il soit désintéressé par la gente féminine, mais plutôt qu'il les voit plus comme des objets que des entités dôtées d'une quelconque intelligence. Bref, sur ce site, Joo Wan était un autre homme, et en tant que tel, il pouvait se permettre d'aimer une fille sans que cela ne contredise sa façon de vivre ... du moins selon lui.
Les éclats de rire précédemment mentionnés venaient d'une conversation qu'il avait justement avec sa copine, avec laquelle il s'entendait plus que bien. Il avait passé tout l'après-midi à discuter avec elle en ligne et, après un rapide coup d'oeil à l'horloge de son bureau, il lui annonça qu'il était l'heure pour lui de se retirer. Plusieurs minutes de calins électroniques et de "C'est toi qui te déconnectes en premier" plus tard, Joo Wan quitta sa session et ferma son ordinateur. Il attrapa ensuite sa veste qu'il jeta sur son épaule droite, et franchit la porte de son bureau. En passant, il remarqua que sa secrétaire n'était pas en train de travailler et contemplait son écran de manière un peu trop passionnée.
- Miss Hee Jin ! Vous aurez beau le regarder, aucun bras ne va pousser sur cet écran pour faire le boulot à votre place, alors bougez-vous !
Et il quitta son bureau, le sourire aux lèvres car il aimait bien maltraiter sa secrétaire Nam Hee Jin. Apprendre qu'elle était sa compagne sur My Seoul's Story pourrait lui causer une attaque, mais comme il n'en savait rien pour le moment, il continuait de la rabaisser dans la vraie vie tandis qu'il lui passait la pommade en ligne. Après avoir prit l'ascenseur pour gagner le parking et monter dans sa sublime Lamborghini jaune poussin, Joo Wan franchit les pâtés de maison à vitesse grand V pour rentrer chez lui. Arrivé à son appartement, il jeta négligemment sa veste sur un fauteuil et alla s'écrouler sur son lit.
Ses yeux fixés sur son plafond blanc, son esprit vogua. La plupart du temps, il pensa à la femme qu'il aimait par interposé, si on pouvait appeler ça de l'amour. Joo Wan lui-même n'aurait pu le dire, n'ayant jamais connu ce sentiment. Même de la part de ses parents, il n'en avait jamais reçu. Oh, il ne se sentait pas pour autant comme un enfant troublé, juste qu'il ne savait pas à quoi ressemblait l'amour, et avait donc un peu de mal à l'identifier...
Quand il émergea de ses réflexions, le soleil disparaissait tout juste à l'horizon. Il se tapota les joues pour se réveiller. Puisqu'il n'avait rien fait de l'après-midi, du moins d'un point de vue boulot, il allait devoir travailler ce soir. C'était l'avantage de son travail, Joo Wan pouvait travailler quand il le souhaitait, il y avait toujours un truc à faire à toute heure. Ce soir, son travail l'amènerait en boîte. Qui a dit qu'être avocat était chiant ? ^^
Mais d'abord, une bonne douche !
Quelques minutes plus tard, et après avoir choisi un pantalon de costume et une chemise blanche soyante en satin, Joo Wan était paré. Il avala un morceau en quatrième vitesse avant de repartir au volant de son bolide jaune. Conduite sportive et dérapages contrôlés, l'avocat fit une arrivée remarquée au Night Club. Déboutonnant les deux premiers boutons de sa chemise pour coller au style de la clientèle, il sortit de sa voiture. Il fit les quelques pas qui le séparaient de l'entrée et passa outre la file d'attente pour aller se pointer directement devant le videur, bras croisés. L'homme à la carrure imposante dévisagea le jeune avocat tout en tirant la moue ... puis éclata de rire.
- Joo Wan, mon salaud ! La discrétion et toi, ça fait toujours deux !
Aussi étonnant que cela puisse paraître, l'avocat afficha un sourire apparemment sincère.
- Tu me connais trop bien, Son Yoo ! Bon, c'est pas tout ça mais j'ai du boulot. Le tarif est toujours le même ?
Le videur du nom de Son Yoo acquiesça et Joo Wan lui donna les billets avant de rentrer directement dans la boîte de nuit. A peine quelques mètres plus loin, l'ambiance changeait du tout au tout. Du calme relatif de la nuit, ponctué des quelques rires et angoisses de la file d'attente, on passait au vacarme assourdissant des basses de la boîte harmonieusement assortis aux sons électroniques, le tout soigneusement enveloppé dans une voix douce de femme. Par-dessus la musique, les gens criaient pour se faire entendre alors qu'ils étaient à quelques centimètres l'un de l'autre... bref, un Night Club quoi.
Joo Wan se glissa entre les gens en dansant, plaçant un petit pas sexy dès qu'il s'incrustait entre deux jolies filles, et ce jusqu'à ce qu'il gagne le bar. Là, il se commanda une petite Margharita avant de s'accouder au bar et de dévisager la foule. Le boulot allait pouvoir commencer ...
Son 'boulot', comme il l'appelait, consistait à dénicher des clients potentiels pour son cabinet d'avocats, et quoi de mieux pour un avocat qu'une boîte de nuit dans un quartier riche ? Sirotant tranquillement son cocktail, Joo Wan parcourait la foule du regard quand un choc se fit sentir. Propulsé sur le côté, il se rattrapa comme il pût, c'est-à-dire à la personne juste à côté. Evidemment, la personne chut sous le poids de Joo Wan, entraînant à sa suite son voisin et ainsi de suite. Résultat, une bonne dizaine de personnes soudain au sol, et la belle chemise blanche de Joo Wan décorée par sa propre Margharita...
Légèrement énervé, l'avocat tourna le regard vers l'origine de l'incident : une jeune femme, elle-même à terre. Son visage angélique était charmant. Malheureusement pour elle, cela ne changeait rien aux yeux de Joo Wan. Sa chemise était tâchée, et quelqu'un allait devoir rembourser tout ça !
- Ma Margharita !
Comme souvent lorsqu'il ne connaissait pas les gens, le ton hésitait entre l'humour et l'agression, si bien que l'interlocuteur pouvait librement interpréter la chose selon ce qu'il voulait entendre.